Le bailleur ne peut refuser la cession du droit au bail sans motif légitime même si le bail comprend une clause d’agrément

Lorsqu’un bail commercial comprend une clause d’agrément et que le bailleur refuse d’autoriser la cession du droit au bail, le juge peut passer outre ce refus. Toutefois, l’autorisation du juge ne vaut qu’au profit de la personne qu’il désigne, pas de la personne morale qu’il s’est substituée.

En l’espèce, le locataire de locaux commerciaux avait conclu une promesse de vente de fonds de commerce comprenant cession de son droit au bail au profit de deux personnes physiques, sous condition suspensive de l’accord du bailleur. Le bail commercial contenait en effet une clause subordonnant la cession du droit au bail à l’accord écrit et préalable du bailleur. Face au refus du bailleur, le locataire avait obtenu du juge une autorisation de céder son bail et son fonds de commerce aux deux personnes physiques. Toutefois, ces dernières avaient constitué une société pour acquérir le fonds de commerce et exploiter le bail. Le bailleur avait alors demandé l’expulsion de la société, considérant qu’elle occupait les locaux sans droit ni titre.

Dans cet arrêt, la cour de cassation rappelle dans un premier temps qu’en vertu de l’article 145-16 du code de commerce les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail à l’acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise sont, quelle qu’en soit la forme, réputées non écrites. Le bailleur n’a donc pas le droit d’interdire la transmission du droit au bail en cas de transmission du fonds.

Pour autant, le bailleur a le droit de stipuler des clauses d’agrément. En effet, la prohibition de l’interdiction de céder le bail à l’acquéreur du fonds de commerce ne s’applique qu’à l’interdiction absolue et générale, et non aux clauses limitatives ou restrictives. Ainsi, la clause subordonnant la cession du droit au bail à l’accord écrit et préalable du bailleur est licite.

Dans un second temps, la haute juridiction estime qu’en cas de refus du bailleur à la cession du droit au bail, le preneur a la possibilité de se faire autoriser par le juge à passer outre ce refus injustifié. Toutefois, cette autorisation judiciaire est personnelle aux cessionnaires visés par l’ordonnance, qui deviennent alors locataires. Ils ne peuvent pas se substituer ultérieurement une société, sans l’accord du bailleur.

La Cour de cassation donne ainsi raison au bailleur en l’espèce.

Cass. Civ. 3, 16 novembre 2023, n°22-17.567, F-D N°