Lorsqu’ils se réinstallent en créant une nouvelle société dans le même secteur d’activité, les cédants de droits sociaux ne doivent pas empêcher la poursuite d’activité de la société qu’ils ont vendue. Cette restriction d’activité des cédants doit toutefois rester limitée dans le temps comme le rappelle un récent arrêt de la Cour de cassation.


La cession des actions d’une SAS

Les deux associés d’une SAS éditrice d’un logiciel cèdent leurs actions à une société prestataire de services informatiques. A cette occasion, les cédants deviennent actionnaires et salariés de la société acquéreuse.

Trois ans après la cession des actions de la SAS, un des cédants quitte la société acquéreuse et met fin à son contrat de travail avec elle pour créer une nouvelle société. Un an après, il est rejoint par son ancien coassocié et cédant.

La réinstallation des cédants via une nouvelle société

La nouvelle société créée par les cédants exerce son activité dans le même secteur et propose au marché un produit concurrent à celui de la société cédée. Deux ans après sa création, certains salariés de la société acquéreuse décident de la rejoindre. La société nouvelle attire également une partie de la clientèle de la société cédée.

La société acquéreuse décide alors d’assigner les cédants en restitution partielle de la valeur des droits sociaux et en indemnisation de son préjudice.

Elle fait valoir que leurs agissements ont conduit à un détournement de clientèle attachée aux produits et services vendus à la société acquéreuse, l’empêchant ainsi de poursuivre pleinement son activité.

La Cour d’appel fait droit à ces demandes. Elle interdit aux cédants d’exercer tout acte de concurrence visant la clientèle cédée et les condamne à indemniser l’acquéreuse, d’une part, au titre de la valeur perdue des actions, et d’autre part, pour la perte de chiffre d’affaires.

La réinstallation des cédants plusieurs années après la cession

Les juges de cassation rappellent que la garantie légale d’éviction peut limiter la liberté de réinstallation des cédants mais que cet encadrement doit être limité dans le temps et proportionné aux intérêts de l’acquéreur.

Ainsi, les juges d’appel auraient dû rechercher si, concrètement, eu égard à la situation de la société cédée et du marché concerné, cette garantie se justifiait encore au moment du départ des cédants, soit 3 et 4 ans après la cession d’actions.

A noter. Outre la garantie légale d’éviction, le cédant doit être attentif au respect des éventuelles garanties conventionnelles car, bien souvent, l’acquéreur lui impose par exemple de souscrire un engagement de non concurrence, également encadré dans temps.

Cass. com, 10 novembre 2021, n°21-11975