Licenciement d’une salariée enceinte : l’étendue de l’indemnisation

Dans un arrêt du 6 novembre 2024, la chambre sociale de la Cour de cassation rappelle avec force que le licenciement d’une salariée enceinte, prononcé en violation des règles protectrices, est nul – et que cette nullité ouvre droit à une réparation complète, indépendamment de toute demande de réintégration.

En l’espèce, une salariée licenciée pour faute grave avait saisi le conseil de prud’hommes, invoquant notamment la nullité de son licenciement en raison de la protection légale attachée à sa situation de femme enceinte.

La cour d’appel, après avoir relevé que l’employeur avait connaissance de cette situation, a jugé que l’interdiction de licenciement s’imposait pleinement, aucune faute grave ne pouvant être démontrée. La cour d’appel a ainsi prononcé la nullité du licenciement et condamné l’employeur à verser, outre les indemnités de rupture, une indemnité minimale de six mois de salaire, ainsi que les salaires correspondant à la période de nullité du licenciement.

L’employeur s’est pourvu en cassation, soutenant que, depuis une ordonnance de 2017, une salariée ayant renoncé à sa réintégration ne pouvait prétendre au paiement des salaires postérieurs au licenciement.

La Cour de cassation rejette cette lecture. Elle rappelle que le droit de l’Union européenne – en particulier la directive 92/85/CEE relative à la protection de la maternité – impose aux États membres d’assurer une protection effective contre le licenciement fondé sur la grossesse, assortie d’une réparation à la fois dissuasive et proportionnée. Autrement dit, l’absence de demande de réintégration ne saurait priver la salariée du droit à percevoir les salaires correspondant à la période de nullité du licenciement.

Ce faisant, la Haute juridiction confirme une position constante : les salariées enceintes bénéficient d’une protection accrue, qui ne saurait être réduite à une simple indemnité forfaitaire. La réparation du préjudice doit être intégrale, afin de garantir l’effectivité des droits consacrés tant par le droit national que par le droit de l’Union.

Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence particulièrement vigilante en matière de protection de la maternité et rappelle aux employeurs l’importance de respecter strictement le cadre légal en la matière.

Pour les employeurs comme pour les salariés, cet arrêt constitue une référence essentielle quant aux conséquences d’un licenciement prononcé en méconnaissance de l’état de grossesse.

Cass. soc, 6 novembre 2024, n°23-14.706