L’industrie alimentaire dispensée d’octroyer les primes et les congés supplémentaires d’ancienneté dans le cadre des 35 heures


Dans le cadre de la mise en place des 35 heures, un accord interprofessionnel du 18 mars 1999, couvrant plusieurs secteurs de l’industrie alimentaire, donc plusieurs conventions collectives nationales (CCN), avait été conclu pour encourager les entreprises concernées à négocier sur l’emploi, l’aménagement et la réduction du temps de travail.

Son article 12.1 prévoyait notamment que les entreprises qui abaissaient le temps de travail à 35 heures en maintenant le niveau de rémunération des salariés étaient dispensées de verser la prime d’ancienneté et d’accorder les jours de congés payés supplémentaires prévus par leur CCN.

Une grande société de l’agroalimentaire, qui entrait dans le champ d’application de l’accord interprofessionnel du 18 mars 1999 précité, avait mis à profit ces mesures exceptionnelles, qu’elle avait d’ailleurs transcrite dans un accord d’entreprise du 13 décembre 1999. La société en question avait donc cessé d’appliquer les dispositions conventionnelles relatives à la prime et aux congés d’ancienneté.

Cette société se trouvait soumise à la CCN des biscotteries du 1er juillet 1993, laquelle avait ensuite été remise à plat pour devenir la CCN des biscotteries du 17 mai 2004. Dans cette dernière version, la CCN faisait expressément référence à l’accord interprofessionnel du 18 mars 1999, permettant ainsi à la société de continuer à ne pas attribuer les primes et les jours d’ancienneté.

Une nouvelle convention collective est conclue et ne fait plus référence au gel des avantages liés à l’ancienneté

Une convention collective « des 5 branches industries alimentaires diverses » avait été conclue en 2012. Cette convention s’était substituée à plusieurs CCN de l’industrie alimentaire, parmi lesquelles celle de la biscotterie.

Dès cet instant, plusieurs salariés avaient estimé que le gel des primes et des jours de congés d’ancienneté n’avait plus de fondement et que l’employeur devait à nouveau attribuer ces avantages, expressément prévus par la nouvelle convention collective dite « des 5 branches ».

La cour d’appel avait cependant adopté les arguments de l’employeur et estimé que la CCN « des 5 branches » n’avait pas remis en cause la suspension des avantages liés à l’ancienneté, tel qu’elle résultait de l’accord interprofessionnel de 1999, auquel faisait référence la convention collective de 2004.

L’employeur contraint de se conformer à la nouvelle convention collective

Sans surprise, cet arrêt est cassé. En effet, la convention collective « des 5 branches » s’était intégralement substituée à la convention collective des biscotteries de 2004. Aucune de ses dispositions ne reprenant les textes de 1999 relatifs à la dispense d’application des dispositions conventionnelles relatives aux primes et aux congés d’ancienneté, la société devait à nouveau attribuer ces avantages, sur le fondement de la convention collective « des 5 branches ».

Cette convention prévoyait en effet, en son article 1.11, que les entreprises ne pouvaient y déroger que dans un sens plus favorable aux salariés.

La société ayant repris dans un accord d’entreprise du 13 décembre 1999 le principe de la suspension des primes et des congés supplémentaires liés à l’ancienneté, tel qu’il résultait de l’accord interprofessionnel du 18 mars 1999, cette réserve lui permettait, selon l’employeur, de s’affranchir de la convention « des 5 branches ».

La Cour de cassation rejette l’argument et considère que les clauses de l’accord d’entreprise du 13 décembre 1999 relatives aux avantages liés à l’ancienneté sont, étrangères à la question de l’aménagement du temps de travail.

Cass. soc. 13 octobre 2021, n° 18-18022